A-t-on déjà tout dit sur la Shoah et ses conséquences, a-t-on épuisé le sujet comme on le prétend parfois ou sous-entend sans trop oser le dire ? Certainement pas. C’est tout le contraire. Ça ne fait que commencer et éclairer le parcours de chacun. Continuer à en parler, en explorer les traces et les ramifications, veiller à ce que le génocide ne pâlisse sous cette couche fine et poussiéreuse d’ennui que provoque en nous, instinctivement, l’histoire officielle.
C’est pourquoi « Auschwitz tous jours ». Ici, deux récits (trois si on y ajoute la succession des illustrations) avancent parallèlement, deux histoires distinctes, de fait incrustées l’une dans l’autre. La première est celle d’un peintre résolument parisien, vagabond sensible et mélancolique, habitué des cafés branchés et des gargotes, touriste blessé, divorcé, père, amoureux. Il se raconte, et ce faisant il nous raconte ce qu’il est. Et il est vous ou moi, il est notre alter ego, notre compagnon, notre frère ou voisin de palier. Et peu importe si nous sommes de Toulouse ou de Paris, de Varsovie ou de New York, il est d’ici et de maintenant, il nous ressemble, nous agace, mais nous le suivrons. Le deuxième récit est une toute autre affaire. Monika est Juive polonaise, elle vit dans la Varsovie des années trente et quarante, elle est donc née au mauvais endroit et au mauvais moment. Mais rien dans les pages qui lui sont consacrées n’est larmoyant, banal ou grandiloquent. Nous suivons Monika au fil des ans, dans son quotidien, dans ses drames en nombre et ses bonheurs tout aussi nombreux, et nous finissons par rêver pour elle de la fin heureuse et d’une vie après la guerre. Par-delà le temps, ces deux êtres se croisent dans la narration et se retrouvent dans la matérialité de l’espace, éclairant de sens le livre tout entier. Un texte incisif et original sur des gens comme les autres, sur la découverte de l’histoire, ou encore sur l’amour, dans ses diverses variations graphiques.Henryk Sienkiewicz
Stefan Żeromski
Stefan Żeromski
S.I. Charpentier